Petit lexique de québécois courant

Ami lecteur, je ne t’apprends rien, la langue officielle au Québec est le français et celle-ci est farouchement défendue, bien plus qu’en France à certains égards. Cependant, avec le temps et l’éloignement géographique, la langue courante a évolué dans des directions différentes de celle que nous connaissons en France. Ainsi, même après s’être habitué à l’absence d’accent français (oui, parce qu’ici ce sont les français qui ont un accent. Paraît-il… :D), les premières discussions avec nos cousins outre Atlantique mènent régulièrement à ce genre de réaction :

Chat_QuéAprès un peu plus d’une année à dialoguer avec mes nouveaux compatriotes, j’ai compilé une liste de mots et d’expressions les plus courants mais qui donnent parfois du fil à retordre pour les nouveaux arrivants. Sans attendre, voici pêle-mêle ladite liste avec son équivalent français.

Le vocabulaire québécois

  • « Dans l’fond » = « du coup »,
  • « C’est correc » = « OK, c’est bon » (se prononce effectivement sans le « T »)
  • « C’est beau » = « OK, c’est bon »,
  • « C’est l’fun » = « c’est fun »,
  • « J’ai bien de la misère » = « J’ai du mal »,
  • « Mon chum » = « mon copain/petit ami ». Si un homme te parle de son « chum de gars », c’est qu’il parle d’ami à lui, pas qu’il fait son coming out,
  • « Ma blonde » = « ma copine/petite amie »,
  • « le char » = la voiture,
  • « Gosser », « niaiser » = faire n’importe quoi ou des bêtises,
  • « Icite » = « ici » (aucune idée d’où vient le « te » additionnel),
  • « Un boute » = un bout. Ex. : « j’ai fait un boute de chemin »,
  • « C’tout une poutine » = « un mélange de quelque chose ». Variante : « T’fais ta poutine » = « tu fais ta soupe »,
  • « Ce qui me chicote » = « ce qui m’ennuie »,
  • « Laite » = très laid,
  • « Tiguidou (layelaye) » = « ok, tout est bien »,
  • « Habriller » = Se recouvrir d’une couverture,
  • « Barrer » = Verrouiller, fermer. Ex. : « Barrer la porte »,
  • Rouler les tests » = expression propre à l’informatique signifiant « exécuter les tests »,
  • « Code 18 » = une autre expression informatique. Elle désigne une erreur due à l’utilisateur (ce noob !). Provient de la distance en pouces qui sépare la tête de l’utlisateur de l’écran,
  • « Une rencontre » = une réunion, un rendez-vous,
  • « Céduler » = anglicisme désignant l’action de programmer / planifier une réunion,
  • « Maganer » = verbe à multiple sens qui peut signifier « abîmer » (« mon char est magané »), « être saoûl » (« j’étais magané samedi soir »), « se faire tabasser » (« j’me suis fait maganer »),
  • « Charrue » = une fille de petite vertue, une traînée. Celle-là, je l’ai apprise alors que j’avais une discussion sur les festivals de musique. J’ai mis un peu de temps à comprendre pourquoi les québécois présents étaient morts de rire lorsque j’ai évoqué le festival des vieilles charrues XD,
  • « C’est croche », « c’est poche », « c’est plate » = c’est nul,
  • « Mes bobettes » = un caleçon. Pour votre plus grand plaisir, une chanson sur les bobettes,
  • « Blé d’Inde » = une variété de maïs. Cette sorte de maïs est mangé à même l’épis, après l’avoir fait bouillir et beurré. En été, il y a les « épluchettes de blé d’Inde » où chacun épluche son épis et le fait bouillir,
  • « Liqueur » = soda (Pepsi, Coca, etc.),
  • « Une tuque » := un bonnet,
  • « Il fait frette » = il fait froid,
  • « Mettre l’épaule à la roue  » = apporter de l’aide dans une tâche importante,
  • « T’es bon(ne) » = tu es doué(e). Mesdames, si un collègues québécois vous parle de la sorte, il y a de fortes chances pour que ce soit un compliment, pas une tentative maladroite de vous déclarer sa flamme. En général, le québécois a un peu plus de classe et de subtilité qu’un wesh,
  • « Lunatique » = « être dans la lune » (et non pas « d »humeur changeante » comme en France),
  • « Garocher » = jeter quelque chose. Ex. : « j’m’en va t’en garocher deux racks »,
  • « Pense vite ! », « Passe vite ! » = « réflexe !! » (en jetant un truc lourd à un collègue non préparé) (Merci à Charles pour la seconde version),
  • « C’est arrangé avec le gars des vues » = quand quelque chose s’ajuste parfaitement,
  • « Pogner » = Prendre. Ex. : « Je l’ai pogné à regarder dans mon ordinateur » ou « L’émission a pogné » (dans le sens « a bien fonctionné »),
  • « Écouter un film » = regarder un film. Celle-là, tous les français tiquent quand ils l’entendent, et j’avoue avoir envie de les reprendre à chaque fois ! Mais c’est pas la peine d’essayer, les québécois ne veulent rien entendre… (sauf le film bien entendu),
  • « Smat » = quelqu’un de gentil, cool, correct (merci à Simon pour la précision),
  • « Habiter chez nous » = qu’il habite seul ou à plusieurs, c’est comme ça que le québécois parlera de son lieu de résidence. Ex. : « Viens prendre un verre chez nous » (alors qu’il/elle habite seul(e)),
  • « Pitonner » = appuyer sur des boutons ou des touches (télécommande, manette de jeu, etc),
  • « Piton » = bouton ou touche,
  • « Gougoune » = des tongs,
  • « Suçon » = sucette (la sucrerie),
  • « Sucette » = suçon (la marque dans le cou que laisse ta copine quand elle veut marquer son territoire :D),
  • « Peser » = appuyer sur quelque chose (c’est une traduction directe du verbe anglais « to weigh »),
  • « Se prendre une brosse » = se prendre une cuite,
  • « Sentir la robine » = lendemain de cuite, lorsque tous les pores de ta peau suinte encore l’alcool !
  • « Fumer des cocottes » = Fumer des joints,
  • « Une jambette » = un croche-pied,
  • « Déjeuner » = le petit dèjeuner,
  • « Dîner » = le déjeuner (à midi),
  • « Souper » = le dîner (le soir),
  • « Un beigne » = un beignet, un donut (« huuuuuuuum, donuuuut »),
  • « Tabagie » = un bureau de tabac,
  • « Dépanneur » = l’épicerie du coin. Mais principalement, il dépanne les personnes en manque de bière après la fermeture de la SAQ du quartier,
  • « Chandail » = un T-Shirt ou un polo,
  • « Balle molle » = une variante du baseball. La balle est plus grosse et elle est lancée en cloche et non pas en trajectoire tendue,
  • « Une toune » = un morceau de musique ! En fait, c’est tout simple « a tune » (le terme anglais) auquel les québécois ont ajouté un « o »,
  • Le « tu veux-tu » = ou l’emploi du double sujet. Je ne sais pas d’où vient cette habitude, mais tu entendras régulièrement les questions commencer comme ceci « Tu veux-tu que je t’aide ? ». Ca fait un peu bizarre au début. Et les fois suivantes. Mais on finit par ne plus y faire attention.

Les Sacres (et autres jurons)

Tout élève d’une nouvelle langue éprouve inéxorablement des difficultés à intégrer le vocabulaire. Excepté lorsqu’il s’agit de gros mots, là, aucun problème !

Et de ce côté-là, nos cousins québécois ne sont pas en reste, avec notamment les Sacres. L’origine des Sacres est bien évidemment le vocabulaire rattaché au sacré, principalement de l’église Catholique, mais pour ce qui est des raisons qui ont poussé les québécois à détourner ces mots en jurons, c’est beaucoup plus flou. Donc plutôt que de te dire une bêtise, je te laisse faire tes propres recherches.

ATTENTION : même si pour nous français, les Sacres nous font sourire, ils sont considérés au Québec comme hautement irrespectueux et offensant. Évite donc de les utiliser en public. De toutes manières, nous ne savons pas les prononcer, donc selon votre « public », il y a fort à parier que les québécois se moquent de toi (le québécois est taquin).

Pour la plupart des Sacres, il existe une ou plusieurs versions « soft », un peu comme lorsque l’on veut dire « m***e » et que l’on dit à la place « mercredi ».

Malgré tout, dans un but purement éducatif, voici une liste non exhaustive des Sacres les plus courants :

  • « Tabarnak » = provient du mot « tabernacle » (une tente qui abritait l’arche d’Alliance). Il existe plusieurs versions soft : « tabarouète » et « tabarnouche » principalement.
  • « Ôstie » = provient de « ostie » a.k.a. « le corps du Christ ». Version soft : « astie ».
  • « Câlice » = provient de « calice », (la coupe qui a recueilli le sang du Christ). Version soft : « câline » (merci à Lin !).
  • « Crisse » = provient de Christ (je vous laisse deviner pour celle-là). Pas de version soft non plus.

Il en existe de nombreux autres mais ils sont très peu utilisés. Vous en trouverez plus sur Wikipedia : Sacre québécois. (Je tiens à remercier mon collègue Alexandre pour son aide pour compléter cette partie 😉 )

Enfin, voici quelques jurons d’origine québécoise contrôlée:

  • « Maudit »,
  • « Chien sale »,
  • « Marde » = remplace le ‘a’ par un ‘e’ !
  • « Tanant » = ennuyant ou chiant,
  • « Chialeux » = qui se plaint tout le temps. Synonyme : « français » 😀

Pour le fun, quelques exemple d’utilisations et leur équivalent français :

  • Le très classique « ôstie d’câlisse » = « Diantre ! »
  • « Crisse de chien sale » = « Manant, tu es visiblement de basse extraction »,
  • « J’suis en tabarnak ! J’m’en va t’crisser la face dans la marde, mon maudit ! » = « Quelle outrecuidance. J’envisage de vous enduire le faciès de matière fécale, mon jeune ami irrespectieux »,
  • « Ôstie qu’je suis tané d’l’entendre ce chialeux » = « Je ne puis supporté plus longtemps la complainte incessante de cet employé de la SNCF ».

Et voilà, c’est terminée. Bien entendu, les différences entre nos deux langues ne se limitent pas à cette courte liste, et j’ai certainement dû oublier d’en noter un sacré paquet. Aussi, si tu en connais d’autres, n’hésite pas à les donner dans les commentaires (avec une petite explication, il se peut que je ne le connaisse pas) et je me ferai une joie de les rajouter !

Du point de vue des français, certains mots ou expressions prêtent à sourire, et je ne compte pas le nombre de fois où j’ai ri après avoir entendu une expression à laquelle je ne m’attendais pas. Cependant, il en va de même pour mes amis et collègues québécois que je fais régulièrement marrer, lorsque je sors un mot bien de chez nous ! J’ai souvenir d’une réunion avec tous les responsables d’un gros projet où j’ai utilisé le verbe « enquiquiner » (j’aurais pu dire « embêter » mais l’inspiration du moment…) Certains rigolent encore !

En tous cas, je remercie mes collègues et mes amis québécois pour leur patience lorsque je leur fais répéter plusieurs fois une phrase ou que je leur demande une explication ! C’est pas facile tous les jours mais ça s’en vient 😉

Avant de te laisser, je te propose la vidéo ci-dessous. Si tu comprends tout, c’est que tu es québécois ou que tu es prêt à le devenir !

Fiston -62- Les regions from Neatworks on Vimeo.